Quand l’AFP fait dans le light contact

Siège de l'AFP à Paris.

Siège de l'AFP à Paris. . DR

La très respectueuse Agence France Presse (AFP), qui célèbre ses 70 ans, se montre à nouveau agressive vis-à-vis du Maroc. En témoigne le traitement très léger, professionnellement parlant, de la plainte déposée par un maître-chanteur notoire dénommé Zakaria Moumni.

Le 03/12/2014 à 19h48

Alors que le froid règne toujours sur l’axe Rabat-Paris, voilà que l’agence officielle française AFP vient accentuer la tension entre les deux pays amis. Elle a ainsi publié, aujourd’hui, une dépêche sous le titre anodin: «Kickboxing: un ancien champion se dit menacé». Sauf qu’il ne s’agit pas d’une banale news digne de la rubrique sport, sur laquelle la vieille dame de la place de la Bourse cherche à redorer son blason après avoir été complètement dépassée sur le plan des news politiques ou économiques, mais bien d’une affaire diplomatique de haut niveau qui vient à nouveau jeter de l’huile sur le brasier diplomatique entre le Maroc et la France. La dépêche de l’AFP nous apprend que le champion du racket, Zakaria Moumni (dont Le360 a à maintes reprises, révélé sa face la plus sombre), vient «de nouveau saisir la justice (française), affirmant avoir reçu des menaces».

Bien entendu ce nouveau soubresaut du franco-marocain qui a perdu toute crédibilité n’a été qu’un tremplin pour l’AFP pour s’attaquer, encore une fois, à un haut dignitaire marocain, Addellatif Hammouchi en l’occurrence. Le nom du patron du contre-espionnage marocain est cité au début, au milieu et à la fin de l’article. Un matraquage en règle où, évidemment, les propos aussi mensongers que diffamatoires de Moumni sont pris pour argent comptant, sans aucun recul quant à la réputation que traîne le plaignant, réputation bien plus étoffée que son palmarès dans un sport de rue non reconnu par les instances olympiques. La preuve que Moumni n’est qu’un prétexte à des règlements de compte: alors que l’AFP, de même que toutes les agences au monde, place toujours en tête des dépêches l’information principale, les détails sur la plainte de Moumni ne sont révélés qu’à la fin de la dépêche. Une très curieuse entorse aux règles de l’information qui n’est pas la seule perle de la dépêche de l’AFP.

Mieux encore: nos confrères – devenus visiblement spécialistes dans les articles tendancieux envers le royaume – dédient la première moitié de la dépêche à la version fournie par Moumni, et ce sans même faire semblant de recourir aux précautions d’écriture d’usage. Le récit outrancier, farfelu de Moumni est repris par l’AFP sur un ton affirmatif, assertif. La dépêche de l’AFP transforme la version de Moumni en faits. Dans cette dépêche, il est écrit: «Libéré en février 2012 après une grâce royale, Moumni avait ensuite sollicité une audience avec Mohamed VI pour lui demander une enquête sur les faits de torture qu'il dénonçait. Résidant en France, il avait été invité à se rendre en mars 2013 à Rabat pour rencontrer le roi, mais cette audience n'avait pu se tenir.» On a beau se frotter les yeux, c’est bien une dépêche de l’AFP. Comment les auteurs de cette dépêche ont-ils appris que le roi allait recevoir en audience Zakaria Moumni? Ont-il pris contact avec le cabinet de Mohammed VI pour vérifier cette information? Ont-ils eu sous les yeux la lettre royale conviant Moumni à une audience à Rabat? Les valeureux auteurs de cette dépêche nous éclaireront peut-être un jour sur le don qu’ils ont de transformer les affabulations d’un menteur notoire en faits avérés.

Et ce n’est pas tout. Nos confrères présentent le malheureux épisode de février dernier, à l’origine même de la crise maroco-française, comme une simple convocation de police. «Plusieurs autres plaintes contre M. Hammouchi avaient en février entraîné une grave crise diplomatique entre Paris et Rabat quand des policiers français s'étaient rendus à la résidence de l'ambassadeur du Maroc à Neuilly-sur-Seine pour notifier au patron de la DGST -en visite en France- une convocation d'un juge d'instruction», peut-on lire à la fin de cette dépêche. Or, les journalistes de l’AFP sont bien placés pour savoir qu’un détachement de police s’est déplacé avec ses gros sabots, dans un mépris total des voies diplomatiques d’usage, vers la résidence de l’ambassadeur du Maroc à Paris pour tenter d’interpeller manu militari le sécuritaire marocain de haut rang comme s’il s’agissait d’un dangereux terroriste. Le patron de la Direction générale de la sécurité du territoire (DGST) marocaine est justement un des meilleurs experts mondiaux de la lutte anti-terroriste et un allié de premier ordre pour les services occidentaux dans leur guerre contre la terreur. En témoigne d’ailleurs sa dernière décoration par les autorités espagnoles.

Enfin, quant aux nouvelles accusations de Zakaria Moumni, elles reposent à nouveau sur du vent. Cette fois-ci, il prétend qu’on l’a menacé de dévoiler 58 vidéos «photomontages pornographiques le mettant en scène avec son épouse dans la chambre de l'hôtel de Rabat où ils étaient descendus à l'invitation des autorités marocaines en mars 2013». Il a visiblement de la santé, le père Moumni, lui qui aurait pourtant, selon ses assertions, subi les pires sévices dans un centre de détention secret au Maroc. Mais ça, les journalistes «professionnels» de l’AFP ne le reléveront pas. Ils se soucient peu que Moumni se cramponne à n’ importe quel mensonge pour faire parler de lui dans l’espoir de racketter l’Etat de 4.9 millions d’euros qu’il réclame pour construire une salle de sport à Paris. Les valeureux auteurs de la dépêche, eux, ont juste bondi sur l’occasion pour porter un nouveau coup à des responsables marocains qui ne se laissent pas impressionner par les méthodes néo-colonialistes de certains dignitaires de la République à l’agenda incompréhensible…

Par Ziad Alami
Le 03/12/2014 à 19h48