Chronique d’une journée à l’hôpital Shifa de Gaza Dr. Zouhair Lahna, Gaza, 20h00
Ce soir, j’ai une forte envie de pleurer. Pleurer tous ces enfants que j’ai vu aux urgences de l’hôpital Shifa à Gaza. Cette jeune fille qu’on n'a pas pu sauver malgré le massage cardiaque, les perfusions et l’intubation. J’ai vécu avec les sauveteurs les mêmes gestes chez plusieurs patients qui arrivent évanouis, voire dans les derniers instants de leur vie. Nous essayons de les réanimer mais sans succès. Leur heure a sonné. Le destin a frappé, parfois trop fort. Quand la mort est confirmée, nous savons qu’il n’y pas plus rien à faire. Les médecins, dans un geste de colère et de désespoir, retiennent les tuyaux qu’il ont mis autour du patient devenu martyre. Les photographes prennent des clichés de cette tragédie filmée en direct et transmise au monde entier et surtout au monde arabe-musulman. Les feuilletons du Ramadan se sont, hélas, éclipsées par les « prouesses » d’une armée inqualifiable. Je ne trouve aucun adjectif pour décrire cette armée et ses dirigeants. Mais l’heure n’est pas à chercher un tel adjectif. Les israéliens connaissent bien les méfaits de l’injustice et savent ce qu'il en advient des injustices.
Aujourd’hui, nous sommes les médecins de la fin de la chaîne de massacre, de la récupération ou la désolation. La prévention est aux mains des hommes politiques qui acceptent cyniquement cette mascarade. Je me demande comment certains dirigeants «sans prestige» peuvent dormir. Je parle surtout de ceux qui se disent arabes et/ou musulmans. Muselés par les affaires de l’argent et les compromissions, ils ne peuvent qu’afficher un profil bas, si ce n’est aucun profit du tout.
Quant aux israélites, et aux peuples dits civilisés en Occident, la plupart d’entre eux ont subi le lavage des cerveaux des médias dominants. Ils ne considèrent plus les autres comme des êtres humains à part entière, d’où l’indifférence totale face à ces crimes. Leurs coeurs éprouveraient de la compassion si on massacrait des chiens ou des chats.
Cette agression va certainement s’intensifier parce que les résistants sont mieux organisés. Mais comme les résistants sont considérés et nommés résistants terroristes, Israël considère que la population les protège. Alors, il faut recourir à la technique de la terre brûlée. Je ne peux plus continuer à écrire. J’ai la gorge nouée. Je descends aux urgences…
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