Bernard Lugan: «Si le Maroc avait appliqué les décisions de l’ONU, il aurait récupéré le Sahara bien avant 1975»

Bernard Lugan a présenté son livre «le Sahara occidental en 10 questions» mardi 7 mai 2024 à l'espace d'art Artorium de la Fondation TGCC de Casablanca. (Youssef El Harrak / Le360)

Le 08/05/2024 à 15h52

VidéoBernard Lugan a présenté, mardi 7 mai à l’espace d’art Artorium de la Fondation TGCC de Casablanca, son nouveau livre «Le Sahara occidental en 10 questions» paru aux éditions Ellipses (Paris). Pédagogique et méthodique dans sa démarche, l’historien français a expliqué que depuis sa genèse, le droit international a toujours abondé dans le sens de la marocanité du Sahara.

Interviewé par le géopoliticien marocain Rachid Achachi devant une salle comble et composée aussi bien des tout jeunes que des plus grands, Bernard Lugan a relevé, point par point, comment le droit international donne raison au Maroc sur la question du Sahara depuis ses origines, battant ainsi à plate couture les thèses pernicieusement promues par les thuriféraires d’un droit purement colonial. «Si le Maroc avait appliqué les décisions de l’ONU, il aurait récupéré le Sahara bien avant 1975», a-t-il mis en avant.

«L’Algérie aurait également restitué toutes les parties du Sahara arrachées au Maroc», a souligné Lugan. Selon le droit international, a-t-il poursuivi, le Maroc étant un État démembré par la colonisation, il devait après les indépendances être reconstitué dans ses frontières précoloniales.

Lugan cite à cet égard la résolution n°1514 de l’ONU en date du 14 décembre 1960 qui est très claire à ce sujet : «Les territoires coloniaux arrachés à un pays souverain ne peuvent avoir une forme de décolonisation autre que leur réintégration au pays d’origine duquel ils ont été dissociés». L’article 6 de la même résolution conforte ce postulat en insistant que «si un État a été démembré par le colonialisme, il a le droit de recouvrer son intégrité territoriale après sa décolonisation».

L’historien a appelé, dans la même lignée, le Maroc à s’appuyer davantage sur le droit international et les définitions antérieures à la colonisation. «On ne voit pas suffisamment cet argument dans l’argumentaire marocain. Il faudrait que les juristes marocains s’y penchent plus», a-t-il constaté.

Un livre didactique

Dans une déclaration pour Le360 en marge de la conférence, Lugan a expliqué la raison d’être de cet ouvrage et ses objectifs saillants. «C’est une synthèse partit des premiers livres que j’ai écrits il y a quelques années sur l’histoire du Maroc. En présentant ce livre en Europe et un peu partout, je me suis rendu compte que les questions des spectateurs tournaient toujours autour de la question du Sahara. J’ai conclu que pour les Européens, le fait que le Sahara soit marocain était quelque chose d’un peu inconnu. Pour eux, le Sahara occidental était un autre pays que le Maroc. C’est pour cela que j’ai décidé de faire un livre didactique qui répond à dix grandes questions», a-t-il fait comprendre.

«Déjà, le Sahara occidental n’existe pas, c’est une définition géographique. L’Algérie a voulu faire d’une définition géographique une définition politique et ethnique», a complété Lugan dans la même veine.

«Y a-t-il un peuple sahraoui? Je dis non. Les Sahraouis sont les habitants du Sahara, aussi bien de l’océan atlantique jusqu’à la mer Rouge, toutes les populations du Sahara sont des Sahraouis. Il n’y a donc pas un peuple sahraoui. Il y a des populations des provinces marocaines du Sud qui appartiennent à deux grands groupes: les Tekna et les Rguibat qui sont des tribus attachées au Maroc depuis des temps immémoriaux», a-t-il poursuivi.

À la question de savoir quels sont les principaux enseignements qu’un lecteur lambda pourrait tirer en lisant le livre, Lugan répond: «Les droits historiques du Maroc. Je montre que le Maroc a subi une amputation globale de toute la partie Est du Maroc qui est aujourd’hui la partie Ouest de l’Algérie: Colomb-Béchar, le Gourara, le Tidikelt, la Saoura, Tindouf. Toutes ces régions étaient marocaines. Nous avons historiquement la preuve des Dahirs de nomination de gouverneurs et de fonctionnaires, etc. Dans ces régions la prière était dite au nom du Sultan du Maroc».

Par Saad Bouzrou et Said Bouchrit
Le 08/05/2024 à 15h52