Marocains pris en otage au Myanmar: de nouvelles révélations, la diplomatie marocaine mobilisée

Des militaires thaïlandais montent la garde sur la rivière Moei du côté thaïlandais, à la frontière avec la Birmanie.

Des militaires thaïlandais montent la garde sur la rivière Moei, du côté thaïlandais, à la frontière avec le Myanmar, ou s'activent des groupes armés.

Une source autorisée confirme que 14 ressortissants marocains sont séquestrés au Myanmar (Birmanie) par des bandes criminelles, et assure que la diplomatie marocaine est à l’œuvre pour leur libération. La tâche s’annonce toutefois des plus compliquées: le lieu exact de détention des victimes n’est pas encore identifié et la région concernée est contrôlée par des groupes rebelles armés.

Le 08/05/2024 à 15h58

On en sait plus sur l’affaire des Marocains partis en Thaïlande et qui, depuis, ont été portés disparus. Une source autorisée confirme qu’il s’agirait de 14 personnes, aujourd’hui «bloquées» entre les mains de bandes armées criminelles au Myanmar (Birmanie). Elles ont été victimes d’arnaques à l’emploi, qui les ont conduits du Maroc vers la Thaïlande, puis au Myanmar, où elles ont été prises en captivité, faisant l’objet de tentatives de rançonnage.

La diplomatie marocaine est à l’œuvre pour obtenir leur libération. «Le ministère des Affaires étrangères et des Marocains résidant à l’étranger suit de très près la situation», indique notre source, précisant que l’ambassade du Maroc à Bangkok a entrepris des démarches auprès des autorités thaïlandaises et myanmaraises en vue de surveiller l’évolution des événements.

Dans le même ordre d’idées, les familles des personnes séquestrées ont été reçues au ministère des Affaires étrangères, à Rabat, notamment au niveau de la Direction des affaires consulaires et sociales. L’ambassade de Thaïlande à Rabat a été de son côté approchée par ces familles le 2 mai dernier.

Les efforts, tant du Maroc que des autorités thaïlandaises et myanmaraises, se poursuivent pour la libération des ressortissants marocains, mais ils butent sur nombre de difficultés. À la date d’aujourd’hui, le lieu exact de leur détention n’est toujours pas identifié, et la région où ils sont séquestrés se trouve dans des zones contrôlées par des groupes rebelles armés. Plusieurs enquêtes ont été ouvertes par les autorités judiciaires locales, mais elles n’ont pas encore abouti.

Maltraitance et menaces de mort

Ce qui ajoute à la complexité de la situation, c’est que les ressortissants marocains impliqués dans cette affaire ne sont pas tous des victimes. Certains d’entre eux travailleraient en effet comme rabatteurs pour les bandes criminelles précitées, moyennant rémunération. D’autres ont pu quitter les centres où ils étaient détenus, mais après avoir payé une rançon. Des cas de maltraitance physique ainsi que des menaces de mort ont également été rapportés, affirme notre source.

Pourquoi donc des «touristes» marocains iraient-ils s’aventurer dans des zones connues pour être dangereuses et contrôlées par des milices armées? Les précisions qui nous sont parvenues indiquent qu’elles ont, en fait, été victimes d’une escroquerie à l’emploi. Elles ont été recrutées par des entités opérant sous forme d’entreprises et basées à la frontière entre le Myanmar et la Thaïlande. Leur activité réelle n’est autre que l’arnaque cybernétique, également appelée scamming. Les Marocains en question ont été attirés par de fausses offres d’emploi dans le commerce électronique, avec des propositions alléchantes, comprenant une rémunération généreuse, la couverture de leurs frais d’hébergement et même des billets d’avion.

L’opération de recrutement s’effectue depuis le Maroc par l’intermédiaire de concitoyens servant de relais à d’autres Marocains recrutés au Myanmar. Ces individus sont chargés d’attirer des personnes de leur pays d’origine via de faux profils, parfois de faux portails d’investissement ou de faux sites de jeux de hasard, voire par le biais de menaces d’atteinte à la vie privée.

L’octroi des visas verrouillé

L’itinéraire suivi par les personnes ainsi piégées transite par la Malaisie comme première escale, avant de passer par la Thaïlande. C’est là où les victimes sont transférées par avion vers Mae Sot, ville limitrophe du Myanmar réputée pour abriter des activités illégales. La zone, dernière étape du voyage, est contrôlée par des groupes rebelles armés qui profitent de l’instabilité politico-sécuritaire dans la région.

Les Marocains ne sont pas les seuls à être visés par ces séquestrations et chantages. Des ressortissants d’autres nationalités, notamment africaines, en sont aussi victimes. Le Groupe africain de Bangkok, auquel appartient l’ambassade du Maroc, et des représentants d’organisations internationales, dont l’Organisation internationale de la migration, tiendront à cet effet une réunion de coordination «pour établir une approche cohérente pour inviter le gouvernement thaïlandais à agir dans ce sens et afin de faciliter la libération des ressortissants victimes de ce trafic humain au Myanmar».

Rappelons que l’ambassade de Thaïlande à Rabat a publié un communiqué sur l’affaire, en faisant part de la disposition des autorités thaïlandaises à coopérer avec celles des pays dont les ressortissants sont retenus dans cette région. Elle a expliqué que ce phénomène, «relativement récent», concerne plusieurs ressortissants africains, dont des Marocains.

La représentation diplomatique thaïlandaise a cependant consenti qu’il restait difficile d’identifier les nationalités des personnes retenues, ainsi que le lieu de leur détention. En attendant, elle affirme avoir pris des mesures exceptionnelles dans les procédures d’octroi de visas, afin de prémunir davantage les touristes africains face au risque d’arnaque par les groupes criminels.

Par Tarik Qattab
Le 08/05/2024 à 15h58