Une très vieille querelle

Fouad Laroui. 

Fouad Laroui.  . DR

Mais si quelqu’un, nommons-le Abdelmoula, est né dans une famille sunnite et qu’il se proclame soudain chiite, cela revient à dire qu’il prend position dans une querelle vieille de plusieurs siècles.

Le 18/03/2015 à 13h30

Il paraît qu’il existe des Chiites au Maroc. En cherchant bien, on doit bien pouvoir y dénicher aussi quelques rastafaris et trois adeptes du Vieux de la Montagne.

Bien sûr, chacun a le droit de penser et de croire ce qu’il veut. La liberté de conscience est un principe sacré. Mais ce principe couvre également le droit de critiquer toutes les croyances et, en l’occurrence, cette histoire de Chiites marocains me semble surtout relever de l’éclat de rire, la critique la plus franche qui soit.

En effet, la scission sunnisme-chiisme a eu lieu il y a quatorze siècles, pour des raisons d’une grande banalité : les uns voulaient X pour succéder au Prophète, d’autres préféraient Y. Très bien. En quoi cette querelle nous regarde-t-elle, aujourd’hui ? Ce qui a eu lieu a eu lieu. Les uns sont devenus les Sunnites, les autres les Chiites. Ceux-ci ont d’ailleurs développé une philosophie subtile et intéressante : tant mieux pour eux. Mais si quelqu’un, nommons-le Abdelmoula, est né dans une famille sunnite et qu’il se proclame soudain chiite, cela revient à dire qu’il prend position dans une querelle vieille de plusieurs siècles. C’est un peu comme s’il prétendait intervenir dans la construction de l’Arche de Noé ou de la Tour de Babel. Réveille-toi, Abdelmoula, on est au 21e siècle!

Soyons clairs : si un Marocain est Chiite de naissance, parce que son père est Iranien par exemple, il n’y a là rien à redire. Selon l’article 3 de la Constitution, l’Etat doit le protéger et c’est très bien ainsi. Mais si c’est un Abdelmoula sunnite qui vire chiite un beau matin, alors cela relève de la fumisterie, ou de ce que Freud nommait « le narcissisme des petites différences ». Dans un monde déchiré par les guerres de religion, le Maroc a la chance d’avoir une population plutôt homogène. Que des Abdelmoula y sèment la zizanie sans raison, par pure désœuvrement, ce n’est plus la liberté de conscience mais la tyrannie de la bêtise…

Par Fouad Laroui
Le 18/03/2015 à 13h30